III.1 ORIGINES :
Le domaine de l'Art musulman embrasse tous les pays conquis par les Arabes et soumis à la religion de Mahomet : une partie de l'Inde, la Perse et la Mésopotamie, l'Asie Mineure, la Syrie, l'Afrique du Nord et l'Espagne. L'Hégire ou ère musulmane commence en 622, l'année de la fuite de Mahomet à Médine. Les peuples de civilisation islamique ont laissé une céramique d'une grande perfection. Les pièces ne portent généralement pas d'inscriptions susceptibles d'indiquer une date, ou un lieu de fabrication. Les échanges commerciaux constants entre les divers pays de l'Islam, la rapide diffusion des procédés techniques de l'un à l'autre, rendent difficile toute tentative de classification. C'est de Perse que semble être venu le premier essor, et l'influence s'étend de l'Est vers l'Ouest. Les spécimens de début conservent les formules du vieil art iranien et principalement sassanide. Puis, à partir du VIlle siècle, alors que des rapports plus étroits s'établissent avec l'Extrême-Orient, 1'influence de la Chine en possession d'une technique parfaite et raffinée se fait sentir. Mais l'Islam a su créer avec ces éléments un art profondément original et vivant. Cette originalité ira grandissante à mesure qu'on s'éloigne des premiers siècles de l'Hegire. Les Musulmans ont excellé dans le décor en surface, d'où l'éclatante supériorité de leurs étoffes, de leurs tapis et de leur céramique. Ce que l'artiste recherche avant tout, c'est l'arabesque, le jeux des lignes et des couleurs, l'adaptation du décor à la surface, indépendamment du sujet représenté (conception à l'opposé de celle du potier athénien).
III.2 PÉRIODE ARCHAIQUE (VIIIe au XIIe siècle) :
Les séries les plus anciennes remontent à une période qui s'étend du Vllle au Xlle siècle et ont été livrées par les sites de la Perse, Suse et Rhaghès, près de Téhéran ; de la Mésopotamie, Samarra ; de l'Egypte, Fostat. On y voit apparaître les techniques les plus diverses : décor gravé sur engobe et sous couverte, décor en relief, décor peint sur émail et enfin le décor lustré qui est peut-être le plus caractéristique des céramiques musulmanes. Ce lustre à reflets métalliques variant du jaune doré au rouge cuivre, au brun et au verdâtre, est obtenu par l'application volontaire de sels oxydants à la cuisson, et se différencie de l'irisation produite par le séjour prolongé dans la terre ou due à un hasard de fabrication. Son usage se répand bientôt dans tout le monde musulman et jusqu'en Espagne où des fragments de faïences lustrées remontant aux Xe et XIe siècles ont également été découverts. Les régions de Sultanahad, Hamadan, Amol et Zendjan en Perse, la ville de Rakka sur l'Euphrate ont fourni des céramiques datant pour la plupart des XIe, XIIe et XIIIe siècles. Les pièces attribuées à la Syrie, souvent confondues avec celles de l'Egypte, proviennent en majeure partie de Damas.
III.3 FAIENCES PERSANES (XIIIC au XVIIIC siècle) :
Les faïences persanes, nombreuses et de types très divers, s'échelonnent de l'époque archaïque jusqu'au XVIIIE siècle et proviennent principalement des fouilles faites à Rhaghès. L'un des groupes les plus importants est formé par des pièces à décor lustré. Une autre série très connue est celle de faïences peintes de sujets à personnages tout à fait dans le style des miniatures contemporaines, d'une polychromie recherchée où dominent les bleus et les ors. Certaines faïences ajourées du XIIIe siècle rappellent les porcelaines chinoises dites "à grain de riz ". Les motifs de leur décor, découpés dans le corps de la faïence, se trouvent à la cuisson recouverts par l'émail seul et se détachent en transparence sur le fond opaque. Aux XVIIe et XVIIIe siècles, époque de grande floraison des arts Industriels en Perse Musulmane, l'influence chinoise s'accentue et devient prépondérante. Une manufacture fut fondée à Tébriz pour rechercher le secret de la porcelaine chinoise. Les céramistes persans s'efforcent alors d'imiter non seulement les décors, mais la matière même des porcelaines Ming et Kanghi, et grâce à l'élévation de la température de leurs fours de cuisson obtiennent des faïences d'une pâte serrée et d'une grande dureté sans toute fois égaler la porcelaine.
III.4 FAÎENCES DE L'ASIE MINEURE (XVe, XVIe et XVIIe siècles) :
On s'accorde assez généralement aujourd'hui à considérer " Nicée ", ville d'Asie Mineure, comme le lieu d'origine des faïences si réputées longtemps attribuées à " Kutayeh ", à " Damas " et à " Rhodes ". Ce sont des céramiques à décor peint qui par leur finesse et l'éclat de leur glaçure rivalisent avec les porcelaines de l'Extrême-Orient. Les faïences dites " de Kutayeh ", dont les plus anciennes remontent au XVe siècle, forment un premier groupe. Ces pièces portent un décor d'arabesques alternativement bleu pâle sur fond blanc ou en réserves blanches sur fond bleu. Les faïences dites " de Damas " apparaissent au début et déclinent à la fin du XVIE siècle, celles dites " de Rhodes " sont un peu plus tardives et leur fabrication se maintient jusqu'au XVIIIe siècle. Le décor de cette céramique est caractérisé par la prédominance de l'élément floral et par une riche polychromie.
III.5 FAIENCES HISPANO-MAURESQUE :
On désigne sous le nom de " Faïences hispano-mauresques " les faïences que reproduisirent les populations mauresques d'Espagne. Remarquables par l'éclat de leur lustre métallique et la richesse de leur décor, elles forment, parmi les céramiques musulmanes, un groupe homogène et bien distinct. Les deux grands centres de fabrication sont les régions de " Malaga " et de " Valence ". La production des ateliers de " Malaga " prend un grand développement dès le XIIIe siècle, lorsque Malaga tombe au pouvoir des rois catholiques. C'est aux XVe et XVIE siècles, principalement, lorsque décline celle de Malaga, que la fabrication de " Valence " atteint son apogée. Des ateliers existaient aux environs, à " Paterna " et à " Manisès " faubourgs de la ville. L'exportation des faïences hispano-mauresques prit un grand essor à partir du milieu du XVe siècle. Nombre d'entre elles furent exécutées pour l'Italie, ce qui explique la présence d'armoiries siennoises et florentines. A la fin du XVe siècle, le style décline rapidement sous l'influence italienne, et la décadence s'accentue au XVIe et au XVIIe siècle, après la conquête du royaume de Valence et l'expulsion des populations mauresques.
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